Dans le cadre de ses missions de contrôle, la Cour des comptes a publié le 27 mai 2021 le rapport définitif portant sur les comptes et la gestion d’Enedis pour les exercices 2011 à 2018. L’institution préconise l’élaboration d’un contrat de service public entre le gouvernement et Enedis afin de préciser les priorités de l’entreprise et compléter lorsque nécessaire son cadre règlementaire et contractuel. Elle souligne également les « enjeux financiers considérables de la transition énergétique » auxquels elle devra faire face. Sont annexées au rapport, la réponse de la présidente du directoire d’Enedis, du président-directeur général d’EDF, de la ministre de la transition écologique, du ministre de l’économie, des finances et de la relance.
L’avis de la Cour des comptes sur la gestion d’Enedis est globalement positif et relève de « bonnes » performances financières avec un résultat net de près de 650 M€ en moyenne sur la période 2011-2018, un chiffre trois à quatre fois plus élevé que sur la période 2007-2010.
Toutefois, la Cour note que « le mode de rémunération du capital d’Enedis présente un caractère atypique et devrait être revu ». Elle invite ainsi à revoir le mode de rémunération du capital d’Enedis en le rapprochant autant que possible de la méthode majoritaire en Europe de rémunération d’une base d’actifs représentative de l’activité globale de l’entreprise.
- La présidente du directoire d’Enedis, dans sa réponse au rapport définitif, si elle indique qu’Enedis partage pleinement la recommandation de la Cour, souligne qu’il est essentiel que cette refonde du mode de rémunération puisse se faire à revenu tarifaire équivalent.
En premier lieu, le rapport note que si la relation d’Enedis avec les autorités concédantes est plus équilibrée que par le passé, le quasi-monopole confié à Enedis se trouve fragilisé par des différends récurrents, qui ont trouvé un écho supplémentaire avec « la montée en puissance des collectivités territoriales » dans le prolongement des réformes institutionnelles sur les métropoles. A ce titre, le rapport indique que « le consensus sur le rôle prééminent d’Enedis ou la péréquation tarifaire est moins fort aujourd’hui qu’hier, et les discussions autour des projets de restructuration d’EDF alimentent ces interrogations. »
A ce titre, la clarification de ses missions de service public par l’État et de leurs conditions d’exercice est « indispensable » selon la Cour, et la signature d’un contrat de service public, « trop longtemps différée », y contribuerait.
- La ministre de la transition écologique, dans sa réponse au rapport définitif, indique que le Gouvernement va lancer les travaux d’élaboration du contrat de service public, afin de préciser les priorités qu’il entend donner à Enedis mais aussi de compléter lorsque nécessaire le cadre réglementaire et contractuel.
Plus loin, la Cour des comptes souligne que les missions d’Enedis évoluent sous l’effet de la croissance des énergies renouvelables et de la transformation numérique. Ainsi, l’acquisition de nouvelles compétences en matière de gestion des flux ainsi que la mise au point d’outils destinés à anticiper et piloter les variations de la consommation et de la production sont « nécessaires ». Dans ce cadre, le développement des réseaux intelligents génère à son tour de nouveaux champs d’action, notamment en matière de gestion des données. S’agissant de l’émergence de nouveaux usages, comme l’autoconsommation et les véhicules électriques, « ces évolutions ont encore un impact limité sur l’activité et les finances d’Enedis. L’entreprise reste néanmoins attentive à ces changements susceptibles de faire évoluer son modèle économique et le périmètre de ses missions, dans un contexte marqué par l’atonie de la consommation d’électricité. »
Dans cette perspective, il est nécessaire, selon la Cour, de « faire face aux enjeux financiers considérables de la transition énergétique sans négliger le renouvellement et la modernisation d’infrastructures vieillissantes ». Dans ce contexte, le rapport insiste sur le renforcement de la gouvernance pour garantir que le niveau des dépenses d’investissements permette à l’entreprise de remplir ses missions de service public. Dans le prolongement des précédents rapports de la Cour, des améliorations destinées à accroître la transparence et la concertation autour des programmes locaux d’investissements ont déjà été apportées, lesquelles doivent se poursuivre avec la mise en œuvre du nouveau modèle de cahier des charges, selon le rapport.
En outre, le rapport insiste sur les leviers d’optimisation des dépenses qu’il faut mobiliser. La Cour recommande ainsi à la CRE et aux pouvoirs publics d’engager des réflexions sur de nouveaux mécanismes financiers permettant le développement des flexibilités. « Ceux-ci doivent permettre de préciser à quel moment et dans quelles conditions l’entreprise doit investir dans le renforcement du réseau et, à l’inverse, dans quelle configuration elle devrait faire l’économie d’un investissement surdimensionné et gérer les points de fragilité du réseau par l’effacement ou le stockage. »
- Sur ce point, la ministre de la transition écologique indique qu’il convient de trouver un juste équilibre entre renforcement des réseaux et solutions de flexibilité, au risque sinon de conduire à des sous-investissements chroniques dans les réseaux. En effet, les besoins de la transition énergétique (en particulier le développement des énergies renouvelables et de la mobilité électrique), mais aussi les conséquences du changement climatique, vont nécessiter un renforcement massif et régulier du réseau. Il ne me semble donc pas opportun de limiter ou repousser les travaux de développement du réseau comme invite la Cour des comptes.
Enfin, la Cour relève que la qualité de l’alimentation électrique sur les territoires peut parallèlement être améliorée : la réduction de la durée moyenne des coupures (61 minutes en 2010 à 50 en 2018) « reflète mal les disparités entre les territoires qui restent importantes ». Pour améliorer la qualité de |’alimentation électrique sur les territoires, il est recommandé d’améliorer la fiabilité des informations collectées, adapter les critères de qualité et prévoir des mécanismes d’incitation et de sanction dans le TURPE.